La 12e conférence mondiale sur le cancer de l'œsophage (OESO) a eu lieu à Paris le 29 août 2013, et a été l'occasion de revenir sur les fondements des cancers de la gorge en général, et particulièrement ceux de l'oropharynx. Une session spéciale a même été consacrée à ce sujet et les réflexions ont porté sur une contamination de ce segment du pharynx par le papillomavirus (HPV). C'est ainsi que la question de la pratique du sexe oral, le cunnilingus notamment, a été remise au grand jour en vue d'expliquer la contamination par ce virus.
Michael Douglas a raison
On se souvient encore de la sortie médiatique récente de l'acteur Michael Douglas qui avait stupéfait plus d'un avec une incroyable annonce. En effet, dans le quotidien anglais The Guardian, la star d'Hollywood a fait savoir que le cancer de la gorge qu'il a chopé en 2010, était dû à son habitude à pratiquer le cunnilingus. Ainsi, il aurait été contaminé par le HPV à partir de cette sexualité orale.
Beaucoup de personnes, dont les spécialistes du cancer, ont eu du mal à croire cette affirmation, étant donné qu'il paraît impossible qu'un virus soit à la base d'un cancer. Le doute était surtout très grand quand on reconnaît le tabac et l'alcool comme les causes premières des cancers de la gorge. Toutefois, l'acteur pourrait avoir raison car depuis quelques années, l'HPV a été évoqué comme un sérieux facteur de risque des cancers de la gorge et de la bouche. Des écrits de scientifiques ont même mis en avant la présence de ce virus dans les cellules cancéreuses localisées à ces endroits du corps.
A ce sujet, on peut se référer à l'article cosigné par le Pr Stina Syrjänen de l'Université de Turku en Finlande, publié en 2012 dans BioMed Central Cancer. La scientifique, qui avait déjà alerté en 1982 sur l'implication de l'HPV dans la survenue des cancers de l'oropharynx, a remis cela avec l'aide d'autres collègues. Cet article informe de la survenue de 15 000 nouveaux cas de cancers chaque année en Europe du fait des HPV 16 et 18. On y apprend qu'environ 300 000 cas de condylomes étaient également découverts annuellement sur le continent.
En Afrique subsaharienne, une pratique courante des tradipraticiens (spécialistes de la pharmacopée traditionnelle africaine parfois mêlée à des procédés incantatoires) est d'amener les "grands malades" à avouer leurs habitudes déviantes. C'est ainsi qu'ils apprennent régulièrement que divers cas de cancers de la gorge (et du col de l'utérus pour ne citer que ceux-là) sont dus à la pratique du sexe oral, un comportement déviant et donc honteux dans cette localité du monde encore attachée à ses bonnes mœurs, le sexe étant fait pour le sexe et non pour la bouche.
La population masculine plus exposée au papillomavirus
Pendant la tenue de l'OESO, le Dr Bin Wang de l'Université de Sydney a tenu le crachoir pour annoncer que les différentes formes de HPV entrainent le cancer en immortalisant et en transformant les cellules infectées. L'homme de science à tout de même reconnu que plusieurs mécanismes de fonctionnement de ce type de virus ne sont pas encore bien connus. C'est le cas par exemple d'une infection plus importante au sein de la population masculine.
Les statistiques publiées l'année dernière par des chercheurs des Universités de Rockville et de l'Ohio dans le Journal of the American Medical Association (JAMA) font état d'une fréquence d'infection orale à l'HPV de 1,6% chez les hommes et de 0,3% chez les femmes, au sein de la population américaine âgée de 14 à 59 ans. On note un risque plus élevé en cas de consommation d'alcool, de tabac ou de cannabis. Les scientifiques ne s'expliquent pas clairement les raisons de ce taux important chez la population masculine, surtout que la situation est la même quand on tient compte des comportements à haut risque aussi bien chez les hommes que parmi les femmes.
Une certitude toutefois : le HPV est un virus dont la transmission se fait principalement de façon sexuelle et le risque pour qu'une personne le porte est proportionnel au nombre de ses partenaires. Et comme le sexe oral est en hausse dans les couples, les cancers de l'oropharynx sont également répandus. En 2006, une enquête révélait qu'en France, 91% des femmes et 94% des hommes, tous âgés entre 18 et 69 ans, affirmaient avoir déjà pratiqué ce type de sexualité.
Un nombre important de papillomavirus
Il existe en réalité plusieurs genres de papillomavirus. C'est pourquoi, il est plus juste de parler « des » HPV. On en dénombre plus de 150 types, certains étant plus dangereux que d'autres. On peut parler par exemple des HPV 16 et 18 considérés comme à haut risque et très impliqués dans la plupart des cancers. Aussi, il faut savoir que ceux-ci ne s'attaquent pas seulement à la bouche et à la gorge car ils apparaissent au niveau de l'anus, du col de l'utérus, du vagin, de la vulve ou encore du pénis. Ces formes de cancers sont ciblées par des vaccins dont le Cervarix et le Gardasil. Mais, il n'existe pas encore de preuve de leur efficacité sur les infections orales. Par ailleurs, certains HPV sont à bas risque, ne provoquent pas de cancers et ne se contentent que de créer des gênes chez les patients.
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